Quand on dit « Moto Club », on pense tout de suite à des concentrations, canettes de bières et blousons en jeans sans manches, mais les Old Fellow Bikers véhiculent une autre forme de culture et un amour pour les motos des seventies.
Un reportage, c’est souvent le début d’une nouvelle aventure à laquelle on ne s’attend pas. Alors que Philippe est tranquillement en train de shooter une Triumph Rocket III, un monsieur m’aborde poliment et se met à me parler « « moto ». Je suis motard depuis 50 ans ! me déclare-t-il. Ca m’interpelle et la discussion se prolonge. Après m’avoir montré les photos de ses motos soigneusement rangées dans son smartphone, il me propose de venir lui rendre visite quelque part dans le brabant wallon, à Waterloo, précisément.
Il me présentera alors aux membres d’un club pas comme les autres, qui accueille notamment un vice- champion du monde de Grand Prix moto, un ex-pilote de F1, un commissaire de police bruxellois… Après cet inventaire à la Prévert, on se dépêche de réserver un moment afin d’aller leur rendre visite. On se retrouve d’abord chez Hugues T. pour découvrir en « vrai », ce qui se fait de mieux dans la production japonaise des années 70 et Hugues me propose le guidon d’une Honda CB750 K0, pour rejoindre l’antre, où la bande des « Old Fellows Bikers » se réunit. Situé, dans une lointaine banlieue striée de rails du tram, le lieu ressemble à une planque dans une série B américaine : une cour délabrée, des bâtiments industriels, du temps jadis, en brique et un hayon métallique qui s’ouvre en couinant. Nous sommes accueillis par Michel Vandamme, fondateur du club et propriétaire des lieux. Dans ce qui pourrait être une vieille usine réhabilitée, Michel possède un grand atelier, qu’il met à la disposition des membres du club ; pour restaurer ses motos et conseiller les membres du club quand ils décident de bricoler ou lorsqu’ils sont à la recherche de véhicules de collection. Michel est expert pour les salles de vente, et conseiller «Oldtimers » à la retraite, pour la marque Honda. On est à peine surpris de serrer la main de Richard Virenque, sept fois Meilleur Grimpeur du Tour de France, qui finit de restaurer le scooter Rumi de son père ! Michel Vandamme a commencé à s’intéresser aux Honda quand il avait quatorze ans. « J’admirais toutes ces petites Honda dans les brochures, explique l’admirateur de Soichiro. C’était comme des petits bonbons colorés. Mais la plupart n’étaient pas importées. »
Collection
En grandissant, Michel a commencé à collectionner ces machines qui l’intriguaient, « La plupart sont des versions « Scrambler » qui proviennent directement des Etats Unis ou du Japon, explique-t-il. Et certaines sont des raretés absolues, comme la CS76 de 1959, dont il ne reste que cinq exemplaires au monde. » Je me régale en circulant au milieu des Dream, des Benly, des CT, de rares SL350, dont un exemplaire complètement cramé par le soleil californien. Il y en a peut-être une cinquantaine, sans compter, celles à restaurer, rangées dans une autre partie de l’entrepôt. Pour me rassurer sur mes connaissances en matière de Honda, il y a différentes versions de la CL450 Scrambler, et une belle CB750 vert sapin. Dans le couloir, cela s’anime et les membres du club arrivent les uns après les autres, créant un étonnant rassemblement de CB750 et CB500 Four, toutes, comme neuves. Pendant que l’on continue de discuter avec Michel, une opération de sauvetage se met en place. Quelqu’un a fait tomber la clé de contact, d’un des membres dans le réservoir de sa moto ! Si ce n’est pas une histoire belge, il doit sûrement y avoir une explication mais en deux temps, trois mouvements, le réservoir est démonté, l’essence vidangée et la clé récupérée. Marc Ysaye, le propriétaire de la K0 à la clé de contact baladeuse, est membre du club depuis environ trois ans « Je suis motard depuis le jour de mes seize ans, confie-t-il. Dès l’âge de douze ans, j’ai cassé les pieds de mes parents afin d’avoir une Honda CS50, mais le jour où l’on a pu enfin aller chez le concessionnaire, ce modèle n’existait plus. Ce sera donc une Honda SS50 à cinq vitesses au pied, mais Marc n’avait pas la moindre idée, de comment cela se conduisait, il est rentré chez lui en la poussant. Rassurez-vous, il n’y avait que 1500 mètres à faire et il était affranchi, dès le lendemain par un copain. Depuis ce jour, Marc collectionne les Honda, il en possède une trentaine de l’Amigo à toutes les versions des Four mais admet qu’il n’a pas les connaissances encyclopédiques de Michel en la matière. « Michel est également incontournable quand on cherche des pièces détachées difficiles à trouver. On le surnomme « Michel Trouvetou ». Marc étant un éminent spécialiste du rock en Belgique (et le batteur du groupe Machiavel) qui se produira en 2025 à Forest National. Plus on discute, et plus on boit de bon vin, autour des tables dressées dans le club, en grignotant un sandwich, ou un plat de pâte, concocté par notre spécialiste et restaurateur Antonio Pinto, et je m’aperçois que l’amour de la marque Honda est le point commun de tous ces gens-là. Ce n’est pas Philippe Graton, le fils du créateur de Michel Vaillant, et auteur des photos qui illustrent cet article, qui va me démentir., lui qui a récupéré une superbe Honda SL350 entièrement restaurée. « C’est Hugues qui m’a trâiné ici la première fois, explique le photographe. « Il me parlait régulièrement de ce « club » qui se veut élitiste, et moi qui me targuais de ne jamais avoir été membre de quoi que ce soit, j’ai fini par les rejoindre. C’est sympa, tout le monde bricole, on se réunit, on discute de tout et de rien, on ne se prend pas la tête, ou plutôt on se la vide des petits embarras quotidiens.
Des Honda, mais pas que…
Avec Claude-Philippe Laroche, qui exerce le doux métier de concierge automobile, on croise enfin quelqu’un qui ne jure pas que par Honda. Je suis venu avec une CB750 K6 bleue, mais je possède également une Kawa, des Anglaises, des Automoto. Mais la Hondamania m’emporte définitivement quand Georges, le responsable presse de Honda Benelux, m’explique son admiration pour les connaissances de Michel Vandamme et le grand intérêt que portent les membres du club à la marque japonaise. Le jour de notre visite, ni le vice-champion du monde de 350 cm3 Didier de Radiguès, ni l’ex pilote de F1 n’étaient présents, mais ce n’est pas très important tant nous avons passé un bon moment avec quelques membres des Old Fellows Bikers, une brochette de passionnés.
A présent, si vous aussi, vous êtes amoureux de ces pépites, désirez trouver un club sélectif de motos anciennes, japonaises ou anglaises ou encore italiennes, ou tout simplement participer à l’une de leurs balades, n’hésitez pas à contacter Michel Vandamme, il se fera un plaisir de vous recevoir. Je demande pardon à tous les sympathiques membres du club qui n’ont pas été cités dans cet article, mais vous ne déméritez pas pour autant.
Texte Jean-Louis Basset et Michel Vandamme– photos Philippe Graton